Le 30 avril dernier, en hommage à tous les engagés volontaires de 1914, trois légionnaires ont été mis à l’honneur pour porter et escorter la main du capitaine Danjou. Ils ont remonté la voie sacrée, fiers et émus, dans le souvenir très présent des 36 000 légionnaires tombés au service de la France depuis 1831.
Ils illustraient parfaitement, en ce jour exceptionnel, la force du lien qui demeure entre nous : “on ne cesse pas d’être légionnaire au moment où on quitte l’uniforme. On le reste jusqu’à la mort” (Georges Manue, "Têtes brulées" 1929).
Volontaire avant tout, le légionnaire qui a choisi de porter les armes d’un pays qui n’est pas le sien est souvent un déraciné qui a trouvé une nouvelle famille. Et, en son sein, des valeurs communes sont découvertes et adoptées. Il sera formé, éduqué, promu et acquerra progressivement son indépendance et son autonomie.
La solidarité fait donc partie intégrante des valeurs de la Légion étrangère : “Chaque légionnaire est ton frère d’armes quelle que soit sa nationalité, sa race, sa religion. Tu lui manifestes toujours la solidarité étroite qui doit unir les membres d’une même famille”.
La nécessité de prendre en charge les légionnaires dans les moments de légitime repos ou les moments difficiles, pour leur apporter assistance et réconfort, en se substituant à une famille absente ou défaillante, est donc apparue très tôt. Dès 1834, les premiers centres de repos ont été créés pour accueillir les malades et blessés au combat.
Chef militaire au charisme universellement reconnu et aux états de service exceptionnels, le général Rollet qui repose au carré militaire du cimetière de Puyloubier, a imaginé puis mis sur pieds les premières œuvres sociales de la Légion étrangère.
Dès 1934, c’est en véritable précurseur qu’il a fait acheter un domaine pour y accueillir les légionnaires quittant le service et arrivant à Marseille. Ce projet est aujourd’hui la Maison du légionnaire à Auriol.
En 1953, le colonel Gaultier poursuit l’œuvre du général Rollet : devant l’afflux des blessés d’Indochine il crée le Service du Moral et des Œuvres de la Légion étrangère, une innovation dans l’Armée française. L’action sociale de la Légion étrangère permet alors d’aider le légionnaire, parfois invalide, à s’intégrer dans la société française, malgré son handicap. À l’image d’une famille, l’attention est constante, même après le départ du foyer d’un de ses membres.
En 1954, le ministère de la Défense confie à la Légion étrangère un domaine de deux cents hectares pour y accueillir les anciens Légionnaires et les blessés d’Indochine. L'institution des invalides de la Légion étrangère voit rapidement le jour. Tous les anciens, les blessés au combat ou dans leur vie pourront, s’ils le désirent, trouver un havre de paix, des frères d’armes, un esprit de corps et la reconquête de l’estime de soi par un travail adapté.
Depuis sa création, cette institution fonctionne grâce au Foyer d’entraide de la Légion étrangère, le FELE dont l’action est universellement reconnue, malgré un cadre juridique très fragile.
Pourtant, en nous confiant ce domaine, la Nation voulait exprimer sa reconnaissance à ces valeureux soldats. Cette reconnaissance est désormais pérenne. La loi de programmation militaire du 18 décembre 2013 a reconnu la spécificité de l’action sociale de la Légion étrangère. Le FELE va devenir un établissement public dont la mission principale sera la mise en œuvre de la solidarité légionnaire.
En l’inscrivant dans la loi, le parlement a ainsi montré à tous les Français la nécessité d’accueillir et d’accompagner ces anciens légionnaires qui ont tout quitté pour servir la France. Cette consolidation juridique intervient au moment où nous fêtons le soixantième anniversaire de l’institution des invalides de la Légion étrangère, fruit d’années d’efforts, de service et de dévouement.
Honneur à tous ceux qui ont contribué à cette action merveilleuse et indispensable dont nous pouvons être -fiers. Car à Puyloubier vibre au quotidien, l’âme de la Légion étrangère.