Le 1er RCP en manoeuvre à Caylus
Les rapaces ont dû prendre à l'ennemi un village solidement défendu. DR
Publié le 11/04/2019 à 19:27 , mis à jour le 12/04/2019 09:09
Défense - Armée, Ariège, Caylus
l'essentiel Voilà pas loin de deux semaines qu’une partie du 1er RCP est en manœuvre au camp militaire de Caylus. Mercredi, l'exercice consistait en la prise d'un village solidement défendu.
«Véhicules en vue», crient les vigies postées sur les toits des maisons. Aussitôt les premiers coups de feu retentissent. Solidement retranchée dans le village du camp militaire de Caylus, la 5e compagnie (azur) du 1er RCP attend de pied ferme les assaillants. Avec l'aide du génie, elle a miné les bois alentour et piégé plusieurs maisons, préparant ainsi une «kill box» (voir ci-dessous). Toute l'astuce repose sur le fait d'arriver à faire passer les assaillants par cette zone. Dans les bois, plusieurs tireurs harcèlent les assaillants. Rapidement, les défenseurs décrochent pour se retrancher dans les bâtiments. Mais les assaillants, échaudés par les premiers pièges dans ces mêmes bois, sentent le coup fourré. Cachés derrière de petits murets de pierre, ils stoppent leur progression et analysent la situation. Contrairement aux films ou aux jeux vidéo, ici pas d'assaut massif insensé, au contraire, tout est mûrement réfléchi et exécuté. «Il n'y a pas de scénario élaboré. Avant d'attaquer, nous avons procédé à une étude de terrain.», explique le lieutenant-colonel Antoine, qui coordonne l'assaut au milieu de ses hommes.
La situation analysée, les attaquants lancent un premier assaut, épaulé sur le côté droit par plusieurs véhicules blindés. Autour d'eux, des hommes avec des gilets jaunes. Ce sont les arbitres. Car si une partie des hommes ( et tous les véhicules blindés) sont équipés de capteurs, il faut bien définir pour les autres qui est blessé ou mort. «Ce qui a permis pour cet exercice d'utiliser des lance-roquettes», souligne le lieutenant colonel.
«Attention grenade», «c'est piégé, c'est piégé…». Rapidement, les assaillants se trouvent bloquer devant les bâtiments, à cause de la présence de tireurs embusqués. Sentant, le piège, ils contournent la zone et réussissent à rentrer par la droite dans une première maison. Détonations, tirs, cris, déclenchement de fumigène… Le rez-de-chaussée est solidement piégé. Mais le bâtiment est rapidement pris. Pendant ce temps, d'autres hommes s‘emparent des bâtiments sur l'aile gauche. À chaque fois, il faut enfoncer la porte, éviter les pièges réalisés par l'ennemi et neutraliser les défenseurs. Comme ces derniers, les assaillants sont aidés par le génie, notamment pour dégager les barbelés et déminer le terrain. Les assauts se font par petits groupes. Une fois la position acquise, d'autres arrivent pour la renforcer et partir à l'assaut de la suivante. Et ainsi de suite.
La partie nord du village conquise, une seconde compagnie arrive en soutien pour prendre le relais et partir à l'assaut du sud. Mais, là ce n'est pas la même histoire. Les défenseurs se sont bien repliés et défendent pied à pied le terrain. À tel point qu'une heure et demie après le début de l'assaut, on entend toujours des tirs et des grenades exploser. «Ils se sont parfaitement défendus. Ils avaient une grande liberté d'action. Le principe de l'exercice était de faire travailler tous les participants, que chacun puisse mettre en œuvre les savoir-faire», indique le lieutenant-colonel. Objectif réussi !
Deux semaines d'entraînement
La première semaine, les hommes ont travaillé les savoir-faire : le tir, le pilotage des VAB (véhicule avant blindé), l’instruction du matériel, le secourisme au combat...
Puis la seconde semaine place à la pratique. « Nous avons travaillé sur des scénarios possibles pour l’emploi du régiment. Nous essayons de répéter ce genre d’exercice plusieurs fois par an », explique le lieutenant-colonel Antoine, chef du bureau opération instruction au sein du régiment. Lors des exercices, les 2e, 4e et 5e compagnies ont été appuyés par des hommes du 17e RGP, du 35e RAP du 1er HP et d’un hélicoptère tigre. Soit au total 400 hommes.
Tout a débuté dimanche soir par un parachutage sur une zone ennemie. Un largage qui s’est terminé de nuit pour compliquer les choses. Les rapaces ont ensuite dû évoluer avec leur appareil de vision nocturne. « Puis nous nous sommes saisis de la plateforme et les véhicules ont pu arriver », indique le lieutenant-colonel. Mais entre-temps, l’ennemi a repris pied dans la région et il a fallu l’en expulser.
D’où l’exercice de mercredi. Un exercice qui permet aux hommes de mettre en œuvre tous les savoirs acquis auparavant. « Je suis très satisfait de ce que j’ai vu aujourd’hui. Les hommes se sont entraînés plusieurs jours avant. Au début de la formation, le niveau de savoir-faire n’était pas encore satisfaisant. Ils se sont aguerris. Et là, l’action est assez satisfaisante du point de vue opérationnel », conclut-il.
Attirer les assaillants vers la «kill box»
C'est un piège vieux comme le monde et d'une extrême facilité à réaliser. Une chaise placée négligemment devant la porte dont un des pieds est relié par un fil à la goupille d'une grenade. L'assaillant la déplace ou la heurte en passant. Plus que de tuer, c'est l'impact psychologique sur l'ennemi qui est recherché. «Et cela le freine sa progression», explique un sergent-chef du 17e RGP.
Épaulé par cette unité du génie, les défenseurs ont réalisé toutes sortes de pièges dans les bâtiments et autour. Ainsi dans le bâtiment principal, tout le bas était piégé avec des IED ( engins explosifs improvisés) notamment sous les fenêtres, l'escalier était bloqué avec du barbelé, les portes fermées avec du mobilier. Et en haut des tireurs étaient embusqués.
Toute la tactique des défenseurs est de réussir à attirer les attaquants dans ce que les militaires appellent la «kill box». Un réduit où ils pourront déchaîner un feu nourri sur les assaillants.
«Une équipe va d'abord les harceler pour les ralentir. Puis leur but est de les faire passer là où ils veulent. Quand on est sous le feu, on cherche la facilité», commente des arbitres. Pas de chance, l'ennemi flairera le coup et évitera la kill box, mais pas les pièges dans les bois…
Emmanuel Droillard