Colonel Chenebeau : «L'enjeu, c'est de réussir le virage technologique»
Le colonel Chenebeau a servi au régiment avant d'en prendre la tête
Publié le 03/07/2019 à 07:59
Défense - Armée, Pamiers
Après deux ans à la tête du 1er RCP, le colonel Sébastien Chenebeau part vers d'autres cieux. Demain, il passera le commandement du régiment au colonel Simonneau.
Quelle est la mission du 1er RCP ?
Sa mission est de participer aux opérations de l'armée de terre et de souveraineté de la France. Tout ce que nous faisons concourt à cette mission : les ressources humaines, la maintenance matérielle. Être employé en opération est la seule vraie finalité du régiment.
Quelles sont vos dernières opérations ?
Nous avons participé à l'opération Sentinelle. En décembre, une compagnie a été en Nouvelle-Calédonie pour une mission de souveraineté sur le territoire français. Auparavant, nous avons été en Côte d'Ivoire et au Mali. Tous les huit mois, le régiment part en opération. Enfin, nous avons aussi un détachement commando au Mali qui est engagé dans les combats de l'opération Barkhane.
De combien d'hommes est composé le régiment ?
Le régiment compte 1 200 actifs auxquels il faut ajouter 250 réservistes qui concourent à la mission. Ces derniers sont employés pour les entraînements et peuvent être déployés sur Sentinelle. D'ailleurs la compagnie de réserve va prendre un tour Sentinelle complet. C'est la première fois. S'ils n'étaient pas là, nous ferions moins de choses. C'est un démultiplicateur.
À quoi ressemble le régiment ?
Il ressemble à une émanation de la société française. Les volontaires arrivent à flux régulier. Sur les 240 annuels, nous en engageons 40 directement au régiment.
Le régiment va-t-il rester à Pamiers ?
Le maintien du régiment n'est pas posé. Il n'y a pas de restructuration en vue, aucun plan. Sa présence à Pamiers est légitime, il n'y a aucune raison de déménager.
Un de vos objectifs était d'implanter le régiment sur la ville.
Je suis satisfait. Il y a une bonne impulsion. Le régiment s'est beaucoup rapproché de Pamiers, son bassin d'implantation naturel. Il est de plus en plus connu des Appaméens. Nous entretenons des rapports cordiaux et amicaux avec les élus. La mairie est très réceptive à nos demandes et très demandeuse de la présence du régiment. Les élus travaillent à son accessibilité par la voie verte. Et ils vont installer un wifi de qualité au quartier Beaumont.
Enfin, avec sa base à Ax, le 1er RCP est devenu le régiment de l'Ariège.
Le quartier Beaumont est une petite ville.
Oui c'est une petite ville où travaillent 1 200 personnes tous les jours. 500 y restent le soir. Mais cela reste un lieu de travail, pas de consommation, ni de divertissement. Cela nécessite des efforts au niveau de l'infrastructure, une adaptation permanente. Cela nous oblige aussi à offrir des facilités de vie avec des lieux de divertissements. Dans le cadre du plan famille, nous allons aussi créer une crèche pour concilier la vie professionnelle et familiale avec des horaires adaptés à notre métier. C'est très rare. Elle sera inaugurée en octobre par la ministre des Armées. Cela va simplifier la vie du para et de sa famille.
Comment voyez-vous l'avenir du régiment ?
En termes de ressource, le défi sera le maintien des effectifs. Il faut un apport de sang neuf. Aujourd'hui, les paras restent entre 6 et 7 ans. Le second est technologique. Mes successeurs vont prendre le virage avec le programme Scorpion qui deviendra une réalité en 2020 et s'étalera jusqu'en 2025. C'est une transformation majeure. Cela va accélérer le cycle de décision avec l'info valorisation. Et cela donnera une meilleure protection et puissance de feu. Cela augmentera la vitesse et la survivabilité du parachutiste. Celui qui gagne, c'est celui qui prend la décision le plus vite et qui survit le plus longtemps. Cette transformation va nous permettre de prendre l'ascendant sur nos ennemis. On ne peut pas se permettre de rater le virage technologique. C'est le vrai défi pour le régiment pour les années à venir.
Comment arrive-t-on à rester un régiment d'élite ?
Le travail, le travail, le travail. C'est un état d'esprit. Il faut avoir le goût du dépassement de soi, de la rigueur de l'exécution. Cela passe par la technique, le physique et l'innovation. Il faut garder un temps d'avance.
Vous passez beaucoup de temps à vous entraîner.
Le combat moderne est très complexe. Il passe par l'acquisition de réflexes. Pour cela, il faut répéter les schémas. Ainsi, le jour du combat, on gagne en sécurité. C'est une question de survie. Vouloir gagner c'est la finalité. En permanence, nous sommes prêts à partir. Comme ça, je ne me pose pas la question de savoir s'il y a le niveau.
En combien de temps pouvez-vous être déployés ?
En 12 heures. 48 heures si nous ne sommes pas en alerte.
Comment définiriez-vous le rapace d'aujourd'hui ?
C'est un jeune français qui a fait acte de volontariat pour servir la France. Il a une motivation patriotique. Il est très disponible, autonome, il sait prendre des initiatives. Il est franc et honnête. Au régiment on cultive aussi l'humilité. Rien n'est acquis. Et surtout, il est fier de son régiment.
Vous avez débuté votre carrière au temps de la conscription. La professionnalisation a-t-elle vraiment changé l'armée ?
Radicalement. Les appelés restaient peu de temps et avaient moins d'expérience. La professionnalisation nous a permis de prendre le virage technologique qui n'aurait pas été possible avec une armée d'appelés. Aujourd'hui, il y a beaucoup de variété dans les armements, les véhicules. La conscription n'aurait pas permis d'arriver au même résultat. Enfin, on peut employer l'armée sans arrière-pensée. Cela a permis de s'engager régulièrement avec plus de facilité et de souplesse pour le décisionnaire politique.
Quelle est la force du régiment ?
La force du régiment c'est l'homme. Le savoir être.
propos recueillis par E.D