Les maires ne veulent pas se souvenir de l'IndochineMémoire. Un mémorial départemental est en projet. Son instigateur, le Dr Aulong, se heurte à l'indifférence de certains élus.Le docteur Aulong (en médaillon, au centre), a détaillé, dimanche dernier,
le projet de mémorial, qui sera bâti à Agen, le long du pont-canal, à côté du monument aux morts d'Afrique du Nord. Photo DDM, Jean-Marc Ramel.
Il en a fait sa dernière bataille, lui, le chirurgien de l'hôpital Lanessan d'Hanoi, qui opérait les « ventres » arrivant par brancardées de l'enfer de Dien Bien Phu.
Et si le docteur Jacques Aulong, 88 ans depuis peu, avait l'air marri, dimanche dernier, dans la petite salle sombre du rez-de-chaussée de la Maison du combattant à Agen, lors de l'assemblée générale de la fédération lot-et-garonnaise des anciens combattants d'outre-mer (FACOM), qu'il a créée, c'est bien à propos de son baroud d'honneur :
le mémorial département en hommage aux morts pour la France lors de la
guerre d'Indochine (1945-1954). Coût total du projet : 55 000 €.
50 réponses sur 316 communesEn projet depuis une bonne année, le mémorial, qui doit être implanté à Agen, au bord du pont-canal, juste à côté du monument aux morts d'Afrique du Nord, peine à trouver des subventions. Pour le conseil général et le conseil régional, la FACOM précise que leur montant sera connu plus tard. Mais ce qui chagrinait réellement le Dr Aulong dimanche dernier, c'était bien le désintérêt affiché par la plupart des communes du département : « J'ai personnellement écrit à chacun des 316 maires, en prenant le soin de préciser les noms et prénoms de tous ces élus, d'ajouter un petit mot personnalisé à tous, voire une formule amicale pour ceux que je connais plus particulièrement ». Dans son budget prévisionnel, le Dr Aulong,
président du comité pour ce mémorial, espérait glaner une dizaine de milliers d'euros auprès des 316 communes du Lot-et-Garonne : « Je dois dire ma profonde déception : je n'ai eu que 50 réponses au total pour un total, provisoire je l'espère, de 2 300 €».
À la FACOM, le président Raymond Jacq prend le relais de son aîné :
« A l'heure où l'on parle tant du devoir de mémoire, le maire devrait être le premier relais de celui-ci auprès de ces concitoyens… ».
« Tonneins a répondu : ce sera 0 € ! »Jacques Aulong s'est même fendu d'un court inventaire, clouant au pilori Tonneins : « Une petite commune de 91 habitants a envoyé 100€.
Quant à Tonneins, deuxième ville du département, après Agen, ayant payé
le plus lourd tribu à ce conflit, avec 8 Tonneinquais morts pour la France en Indochine, son maire m'a répondu : ce sera 0 €! ».
Déterminé, le docteur Aulong ne rend pas les armes : « Je pense essayer d'obliger d'une certaine manière les communes à donner en sollicitant l'Amicale des maires du département ».
Motif de satisfaction en revanche pour le vieux soldat, les associations d'anciens combattants elles-mêmes, qui devraient contribuer à hauteur de 10 000 € environ, les adhérents de la FACOM, dont certaines veuves, aux revenus très modestes, ont envoyé quelques dizaines d'euros (« ces gestes me vont droit au cœur »), ou encore le député-maire d'Agen, Jean Dionis, dont il est un proche, qui versera pour la ville préfecture 1 500 € puisés
« dans sa réserve parlementaire».
Car quel que soit le taux de subventionnement, le mémorial, lui, est près à sortir de terre. Il a déjà été balisé au bord du canal, les plans d'architecte sont réalisés : il s'agit de trois panneaux, sur lesquels les noms de la centaine de soldats seront inscrits. Des panneaux surmontés d'une sorte de toit rappelant celui des pagodes.
« Il sera prêt au printemps et j'espère faire venir, pour son inauguration, le secrétaire d'Etat aux Anciens Combattants, en mai ou juin », confiait encore la semaine passée le Dr Aulong. On saura alors si les maires se sont souvenus de l'Indochine…
Souscription ouverte. Dons à envoyer à Gaston Benneyrat, 2, rue
de Longchamp, 47300 Villeneuve-sur-Lot, à l'ordre du Comité du mémorial
départemental Indochine.
source DDM