- michel v a écrit:
- Bonjour,
Travaillant sur un projet documentaire , je suis à la recherche de témoins ayant connu, ou participé à des missions sur le train la rafale. Dans le cadre de ces recherches je découvre ce témoignage de Mme Y Buzaud. Pouvez-vous m'aider . N'ayant pas la possibilité de m'inscrire , sans antécédent dans le Corps parachutiste, pouvez vous m'aider malgré tout ?
Cordialement
La “rue sans joie” était le surnom donné par les troupiers du CEFEO (Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient) à la ligne de chemin de fer trans-indochinoise et à la Route Coloniale 1 ou RC1 dite "Route mandarine «de Saigon à Hanoï : en effet, les trains et les convois d'automobiles étaient régulièrement attaqués, causant de nombreuses pertes et démoralisant les soldats et les autorités politiques et militaires. C’était le combat du tigre et de l’éléphant voulu par Ho Chi Minh dès 1946.
Pour plus d’informations sur cette fameuse « rue sans joie », vous pouvez vous plonger dans l’excellent livre de Bertrand C.Bellaigue « Indochine » (ISBN : 9782748348897),
ou consulter les sites suivants :
http://2eme-rep-more-majorum.com/2eme_rep/rafale/page_rafale.htm
http://legioncavalerie.free.fr/fr/train.htm
http://www.histoire-pour-tous.fr/bandes-dessinees/75-histoire/4008-la-rafale-bd.html
Les chemins de fer de l'Indochine
De 1885 à 1940
Dès 1885, le gouvernement français avait décidé la construction du chemin de fer de l'Indochine afin de pallier la précarité du réseau routier. Il devait permettre aux habitants de la péninsule de mieux communiquer de province à province, aux richesses naturelles du pays d'être mieux véhiculées vers les lieux de consommation ou vers les ports.
On tenta également de désenclaver le Laos en construisant une ligne pour amorcer une liaison avec le Mékong, on chercha à acheminer vers Saïgon les richesses du Cambodge par une ligne de Phnom-Penh à la frontière siamoise.
Dans le nord, deux lignes reliaient Hanoï à la Chine par Langson et Laokay.
En 1936 les constructeurs du chemin de fer de l'Indochine, en dépit de conditions parfois épouvantables dues aux températures éprouvantes, aux typhons fréquents, à la maladie qui décimait les ouvriers sur les chantiers, aux difficultés du terrain, aux délais de livraison du matériel, pouvaient s'enorgueillir d'un réseau de 3.467 kilomètres.
Médailles des chemins de fer d'Indochine On pouvait aller de Hanoï à Saïgon (1.739 kilomètres) par une voie unique et métrique en moins de 39 heures avec des trains modernes semi-métalliques, tirés par des locomotives Pacific 231-500. Les voitures comportaient des places assises, des couchettes et un wagon-restaurant.Un fourgon postal et un fourgon à bagages complétaient ces trains rapides.
Réseaux ferré et routier de l'Indochine
De 1940 à 1946
L'occupation japonaise de l'été 1940 porta un coup d'autant plus sévère à la souveraineté française que les mesures prises par l'amiral Decoux (gouverneur général de 1940 à 1945) ne purent empêcher les Japonais de prétendre à la mobilisation de notre réseau ferré pour leurs transferts de personnel et de matériel de guerre de la Chine vers les théâtres d'opérations plus méridionaux. En réaction, les forces alliées attaquèrent sans relâche le réseau ferré, détruisant ponts, ateliers, gares, matériels, empêchant la circulation normale sur la totalité des lignes.
La propagande pan asiatique des Japonais suscita une aspiration à l'indépendance chez de nombreux Indochinois, qui furent en outre poussés à la révolte après le coup de force du 9 mars 1945. Le général Leclerc arriva à Saïgon le 5 octobre 1945, mais c'était déjà trop tard pour éviter la destruction du réseau ferroviaire. Aidés par les Japonais, les indépendantistes s'en sont pris au personnel fidèle, l'ont dispersé ou tué, ont pillé les magasins, détruit les gares, saboté les voies et les ouvrages d'art, les lignes téléphoniques et télégraphiques.
Considérablement affaibli par les bombardements alliés, le réseau fut totalement paralysé pendant quelques mois à la suite de cette révolte intérieure qui avait gangrené le pays.
De 1946 à 1948
Associés à l'effort de pacification, les responsables des chemins de fer de l'Indochine ont fait appel à la métropole pour qu'elle ravitaille le pays en matériel nécessaire à la remise en état du réseau, en dépit des sabotages et attaques de l'ennemi.
On s'occupa surtout de la partie méridionale du réseau, au sud du 17ème parallèle, car entre Tourane (PK791) et Ninh Hoa (PK1280), la précarité de la sécurité et la destruction d'ouvrages d'art trop importants interdisaient toute tentative de remise en état. Quant à la zone nord, les circonstances ne permettaient pas sa remise en circulation. Le gouvernement français ayant rapidement approvisionné le réseau, il fut possible de refaire circuler les trains de Saïgon à Ninh Hoa, à Loc Ninh et à Mytho dès le deuxième trimestre 1946. Pour la circulation entre Hué et Tourane, il fallut attendre le 15 octobre 1947. Le réseau cambodgien fut réactivé en 1948.
Création du SMCF Telle était la situation au début de 1946 quand, pour faciliter les opérations de pacification et ravitailler l'armée et la population dans les zones pacifiées, on créa le Service Militaire du Chemin de Fer (SMCF) associant les cheminots et l'armée. A chaque échelon de la direction et de l'exécution des transports ferroviaires correspondait une commission composée d'un cheminot et d'un militaire. Ce service fonctionnera sans relâche jusqu'en juin 1955, date à laquelle le réseau sera remis officiellement à l'administration du Vietnam.
Le SMCF avait pour mission principale d'assurer la régularité des transports par voie ferrée, conformément aux plans d'acheminement des hommes, des matériels et du ravitaillement nécessaires à la satisfaction des besoins prioritaires de l'armée. Parallèlement, il fallait maintenir l'économie des régions desservies, assurer la surveillance des mouvements de populations et de marchandises.
On fortifia donc les gares, on installa des tours de guet aux passages sensibles, on dota les gares de moyens de communication télégraphique et téléphonique. On blinda certains véhicules pour transporter une escorte susceptible de défendre le train.
Pendant cette période, on fit circuler les trains sans grande protection. Le Viet Minh ne disposait alors que de peu de moyens de sabotage. Les ennuis se présentaient sous forme de fossés sous les rails, d'enlèvement d'éclisses et de rails dans les courbes ou près d'un ponceau pour provoquer le basculement de la locomotive.
Sur la ligne de Loc Ninh par exemple, on déboulonnait une file de rails et on les faisait tordre par des buffles. On déséclissait une travée en un point et une autre un kilomètre plus loin. A l'aide de cordes, de buffles et avec une vingtaine d'hommes munis de perches, on retournait l'ensemble des cent travées en une heure de temps (alors qu'il faut une heure pour remettre une travée en place).
En dehors des heures de circulation, les Viet Minh enlevaient purement et simplement des travées entières qu'ils transportaient dans la forêt avoisinante.
Dès 1947, on vit apparaître des embuscades avec des mines artisanales de plus en plus destructrices. La circulation devint aléatoire et l'on vit une rame, partie de Saigon pour rejoindre Phan Thiet (180 kilomètres), mettre plus d'un mois pour faire l'aller et retour.
Le personnel d'escorte des trains et de défense des tours fut, dans un premier temps, pris sur les effectifs militaires des secteurs traversés. Mais on créa rapidement un corps de supplétifs encadrés par d'anciens militaires de carrière. Ce corps de Garde Voie Ferrée (GVF) fut chargé de surveiller et de défendre l'environnement immédiat des points d'appui. Il devait également assurer l'ouverture de la voie ferrée pour des patrouilles matinales avant l'heure de passage du train. Ces hommes ont payé un large tribut dans ce combat livré pour la pérennité du réseau.
On essaya également de faire faire les ouvertures de voie par des draisines armées. Cette solution fut vite abandonnée car trop exposée aux attaques meurtrières.
La Rafale On en arriva vite à la conclusion qu'il fallait un personnel suffisant et sérieusement armé disposant de moyens de communication avec l'échelon supérieur et capable d'appeler l'aviation à son secours. II fut décidé :
1 . d'incorporer dans le train des véhicules blindés et armés occupés par des équipages de militaires spécialisés du 4ème Régiment de Dragons de Gia-Dinh ;
2 . de les grouper en convois de deux à cinq rames, en fonction des besoins, en les faisant circuler en "rafales", à vue, à vitesse réduite (30 kilomètres/heures) et en navette sur de longues sections :
-Saigon à Muong Man (180 km)
-Muong Man à Nha Trang (236 km).
La Rafale devait, officiellement mettre deux jours pour parcourir l'ensemble de la ligne, les rafales montantes et descendantes devant se croiser à Muong Man.
3 . de doter les rafales d'un train pilote, léger, transportant, outre sa propre escorte, des cheminots susceptibles de réparer les sabotages avec du matériel placé sur des plates-formes poussées devant la locomotive.
4 . d'équiper les trains et les gares de moyens de communication permettant de localiser instantanément la Rafale, et de servir de relais en cas d'appel au secours.
On blinda également l'abri des locomotives dans lesquelles bien souvent un sapeur du génie doublait le cheminot.
C'est ce convoi ferroviaire qui fut appelé la Rafale. De 1949 à 1954, la Rafale est toujours passée. Elle a toujours rempli sa mission de liaison entre la capitale et les provinces, de messagerie, de réconfort et d'organe vital de ravitaillement.
Organisation de la Rafale Précédée par son train pilote, dont le guetteur, situé dans la guérite de tête, avait pour mission de prévenir, au moindre soupçon, en libérant son bouchon de frein pour arrêter le train qui suivait à vue, la Rafale avançait.
Elle avait un double commandement :
- un officier commandant d'armes, responsable de la défense du train ;
- un contrôleur de route des chemins de fer, responsable de tout le personnel ferroviaire embarqué et de l'exécution de tout ce qui incombait aux cheminots.
La composition de la Rafale n'était communiquée au commandant d'armes que quelques heures avant le départ de celle-ci pour éviter que les rebelles n'organisent leurs embuscades en fonction de la position des différents points de défense de la colonne.
La communication se faisait entre les wagons d'escorte au moyen du téléphone, et entre les trains de la Rafale, les gares, les points d'appuis, l'aviation ou le train blindé, par radio, pour obtenir une aide efficace et rapide en cas d'attaque.
Du côté ferroviaire, il n'était pas rare que des inspecteurs et ingénieurs du réseau accompagnent la Rafale pour constater la bonne marche du convoi, arrondir les angles dans les relations entre les cheminots et les militaires, inspecter les lieux d'anciennes embuscades, relever les difficultés rencontrées par les ouvriers ou les sapeurs du 5ème Génie chargés de la remise en état des ouvrages d'art sabotés ou de la consolidation de la voie sur des passages rendus délicats.
La présence de ces autorités était salutaire en cas d'embuscade pour éviter les frictions entre le "coroute" et le "commandant d'armes", ce dernier ignorant souvent les impératifs du chemin de fer en matière de sécurité, de besoins en ravitaillement en combustible ou en eau.
C'était d'autant plus nécessaire que, bien souvent, on ne savait pas que le chemin de fer n'avait jamais été réquisitionné et qu'il fallait éviter tout abus de pouvoir risquant de mettre en péril la sécurité du convoi.
La priorité était donnée aux besoins de l'armée, puis de l'administration et enfin aux besoins commerciaux. En fonction du matériel disponible on donnait satisfaction aux demandes diverses en tenant compte du tonnage maximum du train (500 tonnes) dont il fallait défalquer le tonnage des véhicules d'escorte ainsi que les besoins du réseau (matériel pour réparer les véhicules sabotés, rails et traverses de remplacement, pièces détachées d'ouvrages d'art).
Le commissaire de gare remettait au commandant d'armes la liste des groupes de soldats ou d'isolés qui allaient embarquer. Le contrôleur de route se présentait au commandant et lui donnait la liste du personnel ferroviaire participant au voyage.
Il lui indiquait également sa position dans la Rafale. Muni de ces renseignements, le commandant répartissait dans le train les militaires "voyageurs" après leur avoir donné ses instructions pour la conduite à tenir en cas d'attaque, de sabotage, ou simplement lors de l'arrivée dans les gares et aux escales de nuit.
Quand tout était en ordre, le convoi s'ébranlait lentement. Dès qu'on avait franchi les premiers kilomètres, on se sentait tout différent.
La puissance de feu de ce système était considérable. Outre l'armement des militaires de l'escorte, la Rafale disposait d'armes lourdes et de véhicules blindés fixés sur des sablières. En 1947 le commandant avait même des pigeons voyageurs.
Offensives ennemies Les offensives, assez rares au début et dues à des initiatives locales sans grands moyens, furent peu à peu prises en main par le commandement du Viet Minh qui s'acharna à attaquer sur des terrains qui lui étaient favorables, avec des moyens puissants et une orchestration diabolique. Pourtant, il n'a jamais pu empêcher la Rafale de passer.
En 1947, on a vu, au moment où le train pilote s'engageait sur une passerelle jetée sur un arroyo, dans la région de Bien-Hoa, deux buffles tirant chacun sur une corde, séparer les rails de la passerelle ; plus de peur que de mal pour le guetteur.
Une autre fois, une Rafale a été arrêtée à hauteur de Xuan-Loc par l'incendie d'un tas de bois de chauffe, pendant que l'ennemi enlevait plusieurs travées un peu plus loin. Le commandant d'armes alla chercher au hameau voisin les paysans qui avaient été réquisitionnés par le Viet Minh pour saboter la voie et qui avec fatalisme attendaient avec leurs outils qu'on vienne les chercher pour refaire ce qu'on leur avait ordonné de saboter. On retrouvera ainsi une travée entière dans la forêt proche de la voie ferrée.
Il y eut pourtant 37 morts et 43 blessés cheminots cette année-là, par suite de sabotages et d'attaques. Les pertes augmentèrent rapidement à la suite des techniques d'attentat plus sophistiquées jointes au nombre croissant des effectifs du Viet Minh.
Les attaques se concentrèrent sur les passages boisés ou escarpés des routes, de façon à interdire l'arrivée des secours. De nombreuses embuscades furent tendues entre Xuan-Loc et Gia-Huynh, entre Song-Luy et Song-Mao et aux abords de Cana, en bordure de mer. D'autres eurent lieu entre Nga-Ba et Suoi-Dau à côté de Nha-Trang, également entre Loc-Ninh et Saïgon où l'on transportait surtout le caoutchouc des plantations et le bois d'oeuvre des forestiers.
L'intérêt économique était énorme pour le Viet Minh d'interdire la circulation sur cette ligne. Que de sabotages et de coupures de voies entre Lai-Thieu et Thu-Duc durant cette période !
Au cours des mois de novembre et décembre 1950, une Rafale mit 45 jours pour effectuer le parcours aller-retour de Saïgon à Loc-Ninh (180 kilomètres).
La locomotive sauta trois fois et la Rafale dut frayer son chemin, réparant elle-même les coupures de voies. Pendant les premiers arrêts, l'ennemi avait coupé la voie derrière elle pour empêcher l'arrivée du train de secours parti de Saigon.
Ce dernier s'est trouvé lui-même coincé entre deux coupures, à l'avant et à l'arrière. Finalement, on dut parachuter à la Rafale les munitions nécessaires à sa défense, des boulons de crapaud pour réparer la voie ferrée et de l'argent pour permettre aux défenseurs de se ravitailler à la localité la plus proche.
A partir de 1952, les attaques s'intensifièrent. Le 10 juin de cette année notamment, au PKI 666, entre Bau-Ca et Dau-Giay (sur la ligne de Saïgon à Muong-Man), les rebelles attaquèrent entre 10 heures 30 et 14 heures 30 la Rafale 2SN10 composée de quatre trains. Le troisième train sauta sur des mines, mais les Viet Minh avaient été trompés par l'interversion faite à la dernière minute dans l'ordre des trains. Ils tentèrent de donner l'assaut avec la protection d'un feu nourri, mais le train "PC" indemne recula sur le train attaqué tandis que le train de queue serrait sur son prédécesseur. Malgré tout, un corps à corps s'engagea entre les Dragons et le Viet Minh qui avait envahi le train touché ; les Cambodgiens de l'escorte se battirent comme des lions et repoussèrent l'assaut, infligeant des pertes sévères aux assaillants qui perdirent un colonel et un capitaine. Le commandant d'armes ayant réussi à alerter l'aviation, les bombardements et l'arrivée à la rescousse du train blindé mirent en fuite l'ennemi. Après une dernière tentative sur le train de queue, ils se retirèrent en abandonnant une partie de leurs morts et un armement important.
Les pertes se sont élevées ce jour-là à 4 morts, 1 disparu et 8 blessés parmi les militaires ; chez les civils, il y eut 9 morts, 16 blessés et entre 50 et 80 otages dont une vingtaine était relâchée dès le 12 juin. Les cheminots eurent 7 blessés et 4 tués. Les pertes rebelles se montaient à 30 tués et très certainement de nombreux blessés que dénonçaient les traces de sang semées dans leur fuite.
La Rafale était commandée par le lieutenant Gérard du 4ème Dragon et le contrôleur de route Gabriel Nelet. L'ingénieur Dateu, qui était à bord lors de ce combat, négocia avec le directeur des plantations de la SIPH, M. Schmitt, le ravitaillement et la confection des cercueils pour les morts.
On pourrait encore citer de nombreux exemples d'embuscades comme au Cambodge en 1949, où les Khmers Issarak avaient attaqué une micheline, à hauteur de Phnom-Tep-Day. Cela se solda par 8 tués dont M. Laville, l'ingénieur qui dirigeait la ligne. Au PK748 le 17 janvier 1949, les Viet-Minh avaient arrêté un train avec des mines. Ils mirent le feu à un wagon de munitions. De nombreux blessés, 25 tués et plusieurs disparus, qui furent assassinés après avoir été enlevés, comme l'ingénieur principal des chemins de fer M. Langlois et l'abbé Grall. Le 22 juin 1953, dans le col des Nuages, au PK761, une pile de béton du viaduc de "Baika" fut détruite par une forte charge télécommandée provoquant l'effondrement des deux voûtes encadrantes au passage d'un train allant de Tourane à Hué en double traction (20 morts, 46 blessés).
En juin 1954, il a été constaté que, depuis 1946, 202 cheminots avaient été tués et 981 blessés lors des attaques ennemies ; 52 autres furent tués au cours des opérations de relevage des matériels et des voies et 1 968 furent blessés par des mines piégeant les rails, traverses et autres piles de pont. Au total, le montant des victimes pour cette période de 1946 à 1954 s'éleva à 2 933.
Les pertes du côté militaire ont été également importantes. La détermination et le dévouement des cheminots de tous grades et de toutes origines n'ont eu d'égal que le courage et l'abnégation des militaires, réussissant à enrayer la machine rebelle et permettant à la Rafale d'assurer coûte que coûte sa mission. Il serait injuste de citer des noms mais il faut surtout rendre un hommage respectueux à M. Martin, directeur général des chemins de fer de l'Indochine, qui, aidé de ses collaborateurs, a su insuffler à tous ses cheminots l'amour de leur métier qui leur a permis de persister à défendre le chemin de fer en dépit des pertes et des menaces continuelles.
Du côté militaire, on a cité le 4ème Dragon de Gia-Dinh qui assumait les escortes ferroviaires et fluviales dans la zone sud. Mais il ne faut pas oublier ceux de la zone centre ou ceux du Cambodge, qui ont payé leur tribut pour gagner la bataille du rail. Ils ont tous fait un travail monotone et dur : passer des journées entières dans des wagons surchauffés, voir les mêmes horizons défiler, être toujours sur leurs gardes, prêts à la riposte et un jour, sentir le wagon se soulever avec un fracas et une fumée épouvantables tout en gardant suffisamment de sang-froid pour riposter et vaincre l'ennemi.
Saluons la mémoire et gardons le souvenir de tous ceux, cheminots et militaires, qui ont donné leur vie dans l'accomplissement de leur devoir
Jules Petitpierre
Contrôleur Principal d'exploitation des Chemins de Fer de l'Indochine