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| De Trapani à Rome en juillet 1944 | |
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François Vernet enregistré
| Sujet: De Trapani à Rome en juillet 1944 Dim 13 Juil 2014 - 14:35 | |
| C’était il y a exactement 70 ans, le 13 juillet 1944….ce qu’a noté, sur un cahier manuscrit, un jeune sous-lieutenant du 1er RCP, à savoir Pierre Vernet, mon père. Le régiment est en route vers Rome, la Terre de France se rapproche, le Menil aussi… Je pense que mon père, affecté à la 4eme compagnie, était bien évidemment avec celle-ci et que le mouvement qu’il retrace concerne d’abord cette compagnie et le 1er bataillon, mais très probablement également l’ensemble du régiment. Il aura fallu une semaine pour que les parachutistes parcourent par voie terrestre les un peu plus de mille kms séparant Trapani de Rome, le départ de Trapani ayant eu lieu le jeudi 6 juillet 1944 (selon mes calculs en tenant compte de ce qu'a écrit mon père). La localité de San Stefano dont il est question est probablement San Stefano di Camastra, sur la côte nord de la Sicile, tout comme S.Agata di Millitello.
FV
« Jeudi 13 juillet 1944
Je suis à Rome. J’ai quitté Trapani jeudi dans un wagon à bestiaux, vers 6h du soir, et à la vitesse de 25 km/h…J’ai longuement regardé s’effacer derrière moi le Mont Erice ; j’ai vécu trois mois à ses pieds et c’est déjà trop. La première nuit fût inconfortable. Le pays de Sicile – nous suivions la côte nord – est montueux et les tunnels sont nombreux : chaleur épouvantable là-dedans et invasion de vapeur suffocante !...Vendredi matin, le train suit la côte : mer très bleue, de loin en loin quelques épaves de chalands de débarquement. San Stefano : voie coupée sur 30 kms. Il faut décharger le train dans des camions et le matériel est réembarqué à San Agata de Millitello. Cela dure toute la nuit. Le lendemain, bivouac sous les citronniers chargés de fruits encore verts. Villages bâtis sur les hauteurs. Problème de l’eau ? Peut-être bâtis là-haut pour mieux se défendre. Aux arrêts, légions d’enfants qui demandent des bonbons ou des cigarettes. Départ de San Agata le samedi soir. Wagon voyageurs, nuit acceptable. Dimanche matin descente vers Messine. Traversée des monts Péloritains. Entre 2 collines l’Italie apparaît dans la brume bleue. Tout à coup Messine ; beaucoup de destructions – Maisons à toits ce qui surprend agréablement. Long arrêt à la gare. Celle-ci a beaucoup souffert. Des trains entiers sont démolis. Beaucoup de quais et de bâtiments détruits. Embarquement sur le ferry boat à proximité. Un Sicilien plonge, comme un jeune crabe, pour chercher dans l’eau ce qu’on y jette. Départ. 1 heure de traversée, 5 à 6 kms, mer très bleue, comme jamais je ne l’ai vue. On voit très bien la ville, bâtie en croissant et ouverte sur la mer ; descend rapidement des monts qui l’entourent vers le rivage. Dans le port, quelques épaves dont une de gros paquebot. Vers 13 heures, arrivée à Reggio de Calabre. Débarquement rapide. Nous montons dans un train électrique. Tout est brusquement changé, l’atmosphère et le paysage. Des peupliers baignent dans la mer, ce qui est rare. Plage moderne . pays d’apparence plus…civilisée, beaucoup plus européenne. La voie ferrée suit la côte ouest. Paysage merveilleux. Côte qui rappelle la méditerranée française. Voie à 200 m de la mer. De loin en loin quelques épaves, sur terre quelques destructions – Très nombreux tunnels. Près de Gioia Tauro, j’essaie en vain d’apercevoir les Lipari, déjà vus des côtes de Sicile. Gioia Tauro est réputée pour ses huileries. Paysage, depuis Reggio de Calabre est surtout fait d’oliviers, de citronniers et d’orangers. Coupure. Haut pont métallique, presque viaduc, détruit, il pend en trois tronçons dans la vallée, que nous traversons à pied. Nous reprenons un autre train vers 7 heures du soir. Le pays est de + en + vert, il rappelle trop la France. Je passe à Cassino le lendemain mardi dans l’après-midi. Vrai paysage de guerre. Plus une maison intacte. De loin, c’est à peine si l’on s’aperçoit qu’une ville était là. Destructions nombreuses désormais. Nous allons très lentement, il n’y a qu’une voie, l’autre a été coupée méthodiquement tous les 20 mètres et on n’en peut presque rien récupérer !...Finalement, j’arrive à Ciampino mercredi 12h à 15 kms de Rome. 25 kms de marche m’amènent à La Magliana, où je cantonne maintenant. Je suis logé chez un pékin que j’ai encore à peine vu, tout près du Tibre et à 8 kms de la ville. Pont voisin, sur le Tibre, bombardé comme on aurait peine à le croire. »
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| | | offtradi confirmé
| Sujet: Re: De Trapani à Rome en juillet 1944 Dim 13 Juil 2014 - 15:43 | |
| bonjour,
merci pour ce témoignage d'une grande qualité. ses écrits viennent en complément des JMO qui eux ne font rarement part des sentiments.
off-tradi | |
| | | claude millet Fondateur
| Sujet: Re: De Trapani à Rome en juillet 1944 Dim 13 Juil 2014 - 17:37 | |
| - François Vernet a écrit:
- C’était il y a exactement 70 ans, le 13 juillet 1944….ce qu’a noté, sur un cahier manuscrit, un jeune sous-lieutenant du 1er RCP, à savoir Pierre Vernet, mon père.
Merci Francois Vernet, c'est une façon sympathique de fêter ce 70° anniversaire sur "Chemin de Mémoire des Parachutistes et pour nous les gardiens de la mémoire parachutiste de rappeler que Pierre Vernet fut un prestigieux chef de corps du 1er Régiment de Chasseurs parachutistes. | |
| | | | De Trapani à Rome en juillet 1944 | |
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