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| Le général et le régicide | |
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Philippe MULLER Expert
| Sujet: Le général et le régicide Dim 5 Déc 2010 - 20:50 | |
| Source : cyberpresse.ca Publié le 05 décembre 2010 à 05h00 | Mis à jour à 08h22 Didier Fessou Le Soleil (Québec) La Guerre d'Algérie a laissé de profondes entailles dans la conscience collective des Français. Des entailles mal cicatrisées. Peu de cinéastes et peu de romanciers ont osé s'attaquer au sujet. Il faudra attendre 1973 pour que le cinéaste Yves Boisset sorte le premier long métrage sur cette sale guerre: R.A.S. Ce film fut caviardé par la censure et interdit aux moins de 16 ans! Aujourd'hui encore, le sujet dérange. La romancière Alice Ferney publie chez Actes Sud un roman de 208 pages sur l'un des épisodes les plus navrants de cette tragédie: Passé sous silence. Elle aborde le sujet avec tact, réalisme, assurance et lucidité. Le général de Gaulle ne sort pas grandi de ce récit. Les nationalistes algériens non plus. Dans cette affaire, une seule victime : le petit peuple. Trahi par l'un, violenté par les autres. Ce livre met en scène un jeune officier français, Paul Donnadieu, élevé dans le culte de la patrie. Il admirait un général, Jean de Grandberger, qui avait su restaurer l'honneur de la France aux heures les plus sombres de la Deuxième Guerre mondiale. Nous sommes à la fin des années 50. Le pays vit des moments difficiles. Une des composantes de son empire s'est révoltée et réclame l'indépendance à coups d'assassinats terroristes. L'armée a la main lourde mais se révèle incapable d'assurer la sécurité. Le pays est si divisé quant à l'attitude à adopter qu'il est au bord de la guerre civile. L'homme providentiel qui saura rétablir l'ordre et la paix, c'est Grandjean. Il consent à sortir de sa retraite. Tous lui font confiance. À commencer par les militaires. Il parle haut et fort. Il ne ment pas, mais se garde bien de tout dire. Car l'homme a une idée derrière la tête : maintenir cette colonie dans le giron de la France coûterait cher et épuiserait les ressources du pays. L'air du temps est à l'indépendance. Pour en négocier les conditions, il faut que l'armée se rende maître du terrain. L'armée pacifie la colonie et les plénipotentiaires parlementent. Jusqu'à l'obtention d'un accord final. Une fois l'entente conclue, l'une des deux parties ne respecte pas sa parole. Granjean interdit alors à l'armée de s'en mêler. Des officiers se révoltent. Et mettent sur pied un Comité militaire clandestin. Outré par la volte-face de Grandjean et écoeuré par la tournure des événements, Donnadieu se laisse enrôler par le Comité militaire clandestin et accepte d'organiser un attentat contre Grandjean. L'idée n'est pas de tuer l'homme, mais de le faire prisonnier. Afin de lui faire subir un procès pour haute trahison. L'attentat échoue. La police enquête et arrête les conspirateurs. À l'issue d'un procès conduit par une juridiction d'exception, la Cour militaire de justice, Donnadieu est condamné à mort. La décision est sans appel. Huit jours plus tard, il est fusillé dans un fossé. Il avait 35 ans. Il laisse dans le deuil une femme dévastée par le chagrin et trois petites filles qui ne comprennent pas ce qu'il se passe. Une exécution au nom de la justice ou un crime d'État? À la lecture de ce roman, c'est sans ambiguïté : c'est un crime. Un crime au nom de la raison d'État. La raison d'État s'appelle Grandjean. Et cette raison, c'est l'orgueil, l'intransigeance et l'autoritarisme. Le récit d'Alice Ferney est d'une grande sobriété. C'est ce qui fait sa force. Et son efficacité. Rien d'étonnant qu'on en émerge ébranlé et indigné. Ceux qui connaissent l'histoire de France auront reconnu de Gaulle dans le personnage de Grandjean et Bastien-Thiry dans celui de Donnadieu. Ingénieur militaire formé à Polytechnique et lieutenant-colonel de l'armée de l'air, Jean-Marie Bastien-Thiry avait organisé l'attentat du Petit-Clamart, le soir du 22 août 1962. Attentat dont de Gaulle était sorti indemne. Et qui lui fit dire d'un ton gouailleur : «Ces gens-là tirent comme des cochons.» Bastien-Thiry accusait le chef de l'État de parjure envers l'armée française et de porter la responsabilité du massacre de la rue d'Isly à Alger (80 morts), le 26 mars 1962, et celui des enlèvements, viols et massacres perpétrés contre les Français en Algérie après la signature des accords d'Évian sur l'indépendance de l'Algérie. Dans le livre Bastien-Thiry, jusqu'au bout de l'Algérie française (Pygmalion), le journaliste Jean-Pax Méfret écrit : «Les chiffres sont effrayants. Des dizaines de morts par jour auxquels s'ajoutent les enlèvements. Entre le 19 mars et le 10 juin 1962, 1535 pieds-noirs ont été enlevés dans Alger. Disparus à jamais ou retrouvés exsangues et affreusement mutilés.» Et ce, sans parler des victimes du massacre d'Oran (un millier de morts pour les uns, de 400 à 600 pour les autres) à quelques heures de la déclaration officielle de l'indépendance de l'Algérie, le 5 juillet 1962. | |
| | | claude millet Fondateur
| Sujet: Re: Le général et le régicide Dim 5 Déc 2010 - 21:06 | |
| Lisant ton post, des aiguilles de feu me pénétraient la poitrine...!
Que son nom ne soit plus...! | |
| | | SF Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Dim 5 Déc 2010 - 22:54 | |
| J'aurais bien envie d'envoyer à cette Alice Ferney, une liste d'ouvrages à consulter avant de "raconter l'Histoire de France" à sa manière....
Mais par les temps qui courent, je ne m'étonne plus de rien ! | |
| | | Baëtz Daniel Pro !
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 7 Déc 2010 - 14:53 | |
| Bonjour à tous. Lothy écrit: ''J'aurais bien envie d'envoyer à cette Alice Ferney, une liste d'ouvrages à consulter avant de "raconter l'Histoire de France" à sa manière....''. Et Muller cite: ''La romancière Alice Ferney publie chez Actes Sud un roman de 208 pages sur l'un des épisodes les plus navrants de cette tragédie: Passé sous silence.
Elle aborde le sujet avec tact, réalisme, assurance et lucidité.'' Ma question est: Suis-je un mauvais lecteur qui ne comprend pas entre les lignes, il m'avait poutant semblé à la lecture du passage, ci dessus de Muller, qu'Alice Ferney essayait apparemment d'écrire dans le sens réelle de l'histoire, seules changement les noms, et Lothy me donne l'impression de donner une toute autre interprétation de l'écrivain....??? Si Lothy et muller pouvait éclairer mon ignorance sur ce forum, ce serait avec grand plaisir. Je les en remercie par avance. Bien amicalement. | |
| | | SF Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 7 Déc 2010 - 16:05 | |
| Daniel.
Pour nous, français, de la génération qui n'a pas ou peu vécu cette période de notre histoire, il est diffcilie de se faire une opinion sur le comportement de nos hommes politiques, du Général de Gaulle en particulier, puisqu'il semble être l'un des héros du livre en question.
Nous n'y parvenons qu'après avoir écouté les témoins, en espérant qu'ils aient été sincères et en ayant lu quantité d'ouvrages, je citerais ma référence de prédilection : le Général Bigeard, bien que je ne me sois pas arrêtée là, puisque je pourrais citer le Cd de St Marc, les Géréraux, Salan, Challes, Jouhaux et Zeller enfin Yves Courrières.... J'en oublie !
Malgré tout cela je me pose encore bien des questions auxquelles tes camarades ici, ont apporté quelques réponses.
Alors je ne vois pas comment une canadienne peut se permettre de prendre parti, car c'est ce qu'elle fait - le texte de Muller, rapporte ses propos. de publier des affirmations, de classer tel ou tel dans les "tout bon", et tel autre dans les "tout mauvais"....
Si le sujet a été aussi peu et aussi mal exploité au cinéma ou dans les livres, sauf par les témoins, c'est bien parce que n'est pas tout blanc ou tout noir....
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| | | Philippe MULLER Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 7 Déc 2010 - 21:06 | |
| Il me semble qu'Alice Ferney écrit de façon factuelle sans passion ni parti pris.
Je vais faire des recherches la concernant elle et son livre, et si celles çi s'avèrent concluantes je vous en ferais communication.
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| | | SF Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 7 Déc 2010 - 21:46 | |
| Contrairement à ce que j'avais compris, elle est française et née le 21 Novembre 1961 !!!!!!!
Voilà ce que je viens de trouver sur Wikipédia
"Alice Ferney, de sa véritable identité Cécile Brossollet, épouse Gavriloff, est un écrivain français né le 21 novembre 1961 à Paris.
Elle étudie à l'ESSEC (1981-1984) puis prépare à l'EHESS une thèse en sciences économiques, qu'elle soutient en 1990. Elle devient maître de conférence à l'université d'Orléans[3].
Ses thèmes principaux sont la féminité, la différence des sexes, la maternité et le sentiment amoureux"
Elle n'est donc absolument pas contempoaine des faits qu'elle raconte dans son roman !.... D'après quelques infos sur ses ouvrages, il semble qu'elle donne dans le "politquement correct".... A vérifier ! | |
| | | cécile Invité
| Sujet: canadienne Lun 10 Jan 2011 - 21:07 | |
| Messieurs, par hasard je tombe sur votre blog ! Comment ne pas vous répondre ? J'ai écrit ce livre par indignation devant le crime d'état, et je me sens plus libre-penseur que politiquement correcte. Mon père a fait la guerre d'Algérie en tant qu'appelé dans les Aurès. Mon oncle Pierre Brossollet, alors lieutenant, commandait le régiment de tirailleurs algériens pris dans la fusillade d'Isly, on entend sa voix crier halte au feu dans les films d'archives. Mon oncle Gui Brossollet commandait chez les touaregs. Je les ai écoutés. J'ai lu Saint Marc, Courrières, Tournoux et cie. Je crois que ma reconstitution est assez exacte et qu'elle fait ressentir au lecteur une émotion. Merci de m'avoir lue. Cécile Brossollet (Alice Ferney) |
| | | PETIT Pro !
| Sujet: Re: Le général et le régicide Lun 10 Jan 2011 - 22:53 | |
| Merci Cécile, d'apporter vos commentaires ! | |
| | | SF Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Lun 10 Jan 2011 - 23:14 | |
| Merci Cécile de ces précisions...
Une fois de plus, votre témoignage apporte la preuve que des articles de presse plus ou moins tronqués ou manquant d'objectivité, peuvent engendrer des jugements tout aussi erronés ! | |
| | | Philippe MULLER Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 11 Jan 2011 - 8:45 | |
| Bonjour Cécile,
Merci pour les précisions et le témoignage que vous apportez.
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| | | cécile Invité
| Sujet: canadienne Mar 11 Jan 2011 - 20:39 | |
| Merci pour vos réactions. Votre suspicion m'a heurtée (je ne trouve pas le mot). J'ai vraiment travaillé à comprendre et ce sujet m'a habitée. J'ai écrit un livre sur la guerre de 14 et je me souviens que la mort du dernier poilu m'a émue, j'avais le regret qu'il n'y ait plus de témoin (pour répondre à Lothy sur le poids du témoignage). Or pour la guerre d'Algérie j'ai eu le sentiment contraire. J'ai eu le sentiment que la vérité de ces moments ne sortirait que quand les témoins (les gaullistes en fait) auraient disparus, car ils ont trop à défendre. Stora - dont je sais qu'il parle en militant- en convient lui-même : quand l'histoire s'écrit à chaud, son écriture est encore un combat pour imposer sa vision. Toujours pour répondre à Lothy, l'intérêt de ma date de naissance, c'est que je n'ai aucun intérêt à défendre. Hélie de Saint Marc m'a écrit qu'il trouvait mon livre "remarquable", ces mémoires m'avaient bouleversées (mon oncle Paul Brossollet, né en 1920, saint cyrien comme Pierre et Guy a fait l'indochine), vous imaginez combien j'ai été heureuse de ces mots de Saint Marc, comme les vôtres m'ont désolée. Car je crois avoir fait sa place à l'armée et montré à quel point la méconnaissance de ce qu'elle est par la population a été exacerbée par De Gaulle qui l'a profondément trompée et utilisée, déshonorée évidemment. Je suis très heureuse d'avoir trouvé votre blog. Avez vous lu Où j'ai laissé mon âme de Jérôme Ferrari, très belle oeuvre littéraire mais politiquement correcte que vous n'aimerez pas. J'attends vos réactions ! Bien à vous. Cécile - Alice Ferney |
| | | Baëtz Daniel Pro !
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 11 Jan 2011 - 23:37 | |
| Bonjour Cécile. Merci pour votre commentaire. Je suis satisfait de ce que j'avais pensé de vous par votre réaction. Je n'ai pas lu votre livre mais je vais sans plus tarder me rattrapper pour m'en faire une idée. Je n'ai pas l'intention de dire que tout correspondra à la réalité mais je vous crois sincère dans votre démarche. Vous savez comme moi que chaque lecteur interprète suivant ses connaissances historiques et qu'il en tire des conclusions personnelles. L'important est que vous ayez effectué des recherches sérieuses pour vous approcher au plus pret de cette réalité, mais la vrai réalité n'existera jamais car chaque homme qui l'a vécu l'a connu différemment dans sa propre personnalité. Bien à vous. Un ancien du 1er RCP | |
| | | SF Expert
| Sujet: Re: Le général et le régicide Mar 11 Jan 2011 - 23:57 | |
| Désolée Cécile de vous avoir blessée, je déteste cela au plus haut point ! Votre ouvrage nous a été présenté sous une forme tout à fait différente de ce qu'il est en réalité. Ce qui est regrettable, mais n'est hélas pas une première ! D'où ma réserve.... Je comprends que les félicitations du Commandant de St Marc vous aient touchée, c'est un compliment dont vous pouvez être fière. J'ai, comme vous, lu ses mémoires, elles m'ont bouleversée, et fait mesurer la détresse, la solitude de cet homme remarquable à plus d'un titre.. J'ai enchainé ensuite sur ses autres ouvrages, je les ai tous trouvés admirables. - cécile a écrit:
- Or pour la guerre d'Algérie j'ai eu le sentiment contraire. J'ai eu le sentiment que la vérité de ces moments ne sortirait que quand les témoins (les gaullistes en fait) auraient disparus, car ils ont trop à défendre. Stora - dont je sais qu'il parle en militant- en convient lui-même : quand l'histoire s'écrit à chaud, son écriture est encore un combat pour imposer sa vision.
Vous avez parfaitement raison sur ce point ! Tout comme Stora ! Et c'est bien là le grand problème, car si des témoins, ou des personnes comme vous qui ont pris la peine de recueillir des témoignages sincères et vrais, pour écrire sur ce sujet encore très sensible, bien des pseudos témoins remanient l'Histoire à leur manière.... J'espère lire votre livre, et peut-être celui de Jérôme Ferrari, je n'ai jamais hésité à lire des ouvrages en contradiction avec mes opinions, je trouve cela enrichissant. Elevée dans une famille où le Général de Gaulle était une icône, si je n'avais pas possédé ce côté curieux, voire rebelle, je n'aurais jamais lu le Commandant de St Mac, encore moins les Généraux putschistes. | |
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